Quand flics et avocats braquent les finances publiques
par Philippe Randa
(paru sur www.bvoltaire.fr)
On doit le respect à un policier, n’est-ce pas ? Parce qu’il le vaut bien… Mais, au fait, combien coûte-t-il ? Pour certains fonctionnaires de police, le respect est surtout devenue une manne financière et l’Inspection générale de l’administration (IGA) s’en émeut. Son rapport remis le 20 décembre dernier au Ministère de l’Intérieur dénonce un scandale financier à côté des desquels les indélicatesses de Noiret et Lhermitte dans la Saga des Ripoux au cinéma seraient simples facéties, tellement elles coûtent moins aux contribuables !
La collectivité publique « est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages (et) de réparer, le cas échéant, le préjucide qui en est résulté », soit ! Lorsqu’un policier est insulté, il est en droit de porter plainte. Normal ? On en convient tous, mais comme l’administration prend alors en charge les frais d’avocat – environ 1000 euros par dossier + 100 euros en cas de demande de report d’audience + 1000 euros s’il y a appel, ce que certains avocats font systématiquement –, des petits malins usent et abusent de ce droit.
« (D’après le rapport de l’IGS) 20 000 dossiers de “protection fonctionnelle” (“PF”) sont montés chaque année dans la police nationale, et seuls 300 sont rejetés. Si, en 2006, ces dossiers ont coûté 8,7 millions d’euros à l’administration, ces dépenses ont bondi de près de moitié en 6 ans avec 13,2 millions d’euros dépensés en 2012. Des chiffres bien loin de l’univers de la gendarmerie, où seuls 502 dossiers ont été traités en 2012 pour un coût de 604 000 euros », nous apprend Le Figaro.
Quels sont les cas d’injures les plus fréquents ? Ceux durant un contrôle d’identité de SDF (la plupart du temps alcoolisés) ou de mineurs sans qu’il y ait violence… Dans ce dernier cas, si le policier « promet de ne pas porter plainte et de ne pas prendre d’avocat », il obtient quasi-automatiquement 100 euros, comme ce serait souvent le cas à la police lyonnaise…
Mais s’il y a procès et condamnation, alors là, toujours d’après le rapport, une insulte à agent coûte de 300 à 700 euros de dommages et intérêt à l’auteur des faits : « Une manne qui aurait fait tourner la tête de certains policiers », indique Le Figaro qui souligne également que « le rapport révèle que cinq cabinets d’avocats à Paris ne vivent que de ces dossiers de “PF”. Ces cabinets se partagent un marché de 2,5 millions d’euros annuels, soit 40 000 euros par mois pour chacun d’entre eux. »
La solution envisagée par l’IGA « si l’administration entend amplifier les économies budgétaires », est qu’on arrête de prendre en charge les frais d’avocat dans les affaires d’outrages, injures et rébellion sans violence physique.
Ce qui permettrait peut-être de quelque peu soulager la bourse des contribuables ou à tout le moins, d’attribuer les sommes ainsi économisées à rénover matériels, bureaux et véhicule de notre Police
En voilà une idée qu’elle serait bonne, non ? Efficace en tout cas pour assurer un meilleur maintien de l’ordre… et peut-être un peu plus morale, aussi…
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